vendredi 22 janvier 2016

Disparition de Martine JOLY


Martine Joly, Professeur honoraire de l’Université Bordeaux-Montaigne, est décédée le 11 janvier 2016.

L’image aura été d’une manière constante au centre de la carrière de Martine Joly, aussi bien dans ses enseignements que dans ses recherches et ses publications. Ce fut d’abord dans l’enseignement secondaire qu’elle s’intéressa aux rapports entre enseignement et lecture de l’image. Participant dans les années 70 aux recherches appliquées du programme Selicav, piloté par René Laborderie au CRDP de Bordeaux, elle y rencontra Christian Metz. Le théoricien d’une approche sémio-linguistique du film était aussi ouvert à la didactique et Martine Joly fit partie de son séminaire qui se tint dans les années 70, 80 à l’EHESS. S’y retrouvaient de jeunes chercheurs devenus plus tard des spécialistes reconnus de l’image et des proches de Martine Joly, comme Geneviève Jacquinot, Roger Odin, Francis Vanoye. Auteure d’une thèse en Sciences de l’information et de la communication, consacrée aux questions de la réception de l’image, Martine Joly entra à Bordeaux 3 à l’IUP ISIC. Elle reliait toujours étroitement ses enseignements à ses écrits universitaires et ses cours de sémiologie de l’image dispensés à des étudiants en production audiovisuelle et en écriture de scénario, débouchèrent au fil des ans sur d’importantes publications. Ce fut d’abord en 1994, l’Introduction à l’analyse de l’image (Nathan, 128), ouvrage réédité plusieurs fois et traduit en plusieurs langues. L’auteure y proposait une démarche d’analyse des images fixes et mobiles, d’information, de publicité et d’art, basée sur de solides références théoriques en sémiologie. Vint ensuite L’image et les signes (Nathan Université 1997), ouvrage plus théorique mais toujours destiné aux étudiants et aux professionnels de l’information qui explorait sémiologiquement la production de sens par les images. En 2002 , L’image et son interprétation (Nathan Université 2002) se centrait plus sur le spectateur et sa réception des images, en analysant ses attentes, ses engagements, sa réceptivité. Sous la direction de Francis Vanoye, Martine Joly participa à la rédaction du Dictionnaire de l’image (Goliot-Lété, Joly, Lancien, Le Mée, Vanoye, Vuibert, 2006), tandis que ses intérêts s’ouvraient                                                                                                                                                                                                                                                                                                 aux rapports entre images et interculturel, aux pouvoirs de l’image et à la nouvelle prolifération des images comme en témoignent différents articles.
Très engagée dans la vie de l’université, Martine Joly fut directrice de l’IUP ISIC de 1998 à 2003. Dans le domaine de la recherche, elle créa l’équipe d’accueil 2959 IMAGINES (Images, histoire, société) regroupant  des chercheurs travaillant de manière transversale sur les représentations visuelles sous toutes leurs formes, sur leur contexte d’apparition et sur leur environnement d’interprétation. Partie à la retraite en 2003, elle oeuvra encore pour son université, en devenant responsable d’un programme regroupant les régions Aquitaine et Souss Massa Drâa, pour la mise en place de formations cinéma à Ouarzazate, antenne de l’université d’Agadir. Ce fut dans le cadre de ce programme que fut créée une licence de cinéma et que furent organisés deux colloques internationaux, l’un sur l’interculturel dans la formation à l’image (Ouarzazate, Juin 2009), l’autre sur la place des technologies dans l’enseignement supérieur (Ouarzazate, décembre 2014).
Curieuse des autres, ouverte aux cultures du monde, Martine Joly dispensa des conférences dans de nombreux pays et fut dernièrement professeur invitée à l’Université de Manchester.
Beaucoup d’entre nous, étudiants, enseignants gardent le souvenir d’une grande universitaire animée par la passion de la transmission. La recherche pour elle n’avait de sens que si elle pouvait profiter aux autres.

Thierry Lancien
Professeur émérite
Université de Bordeaux-Mon

mardi 12 janvier 2016

Écrire, éditer, lire à l’ère numérique : design et innovation dans la chaîne du livre


12 et 13 avril 2016
Université de Nîmes et Carré d’Art Bibliothèques, Nîmes
Colloque de recherche en design et sciences de l’information et de la communication
sous la direction de Stéphane Vial et Marie-Julie CatoirBrisson (Université de Nîmes)
En partenariat avec les éditions Actes Sud

Dans l’espace francophone de recherche, les humanités numériques (Digital Humanities) sont en plein essor, comme en témoignent les efforts de structuration de la communauté , le développement des formations francophones 3 et francophiles 4, les publications récentes ou le débat actuel sur le libre accès aux publications scientifiques. Elles forment une communauté de pratiques et de valeurs, proche du libre accès, qu’il faut comprendre et questionner. À l’heure de la « grande conversion numérique » (Doueihi, 2008), s’il est de plus en plus admis que les humanités numériques ne sont pas une discipline (Berra, 2012), il estintéressant de les présenter comme une préoccupation qui traverse tous les champs disciplinaires. Cette préoccupation, c’est celle de « la f abrique numériquement appareillée du savoir , incluant sa production (la recherche), sa transmission (l’enseignement) et sa diffusion (la publication) » (Vial, 2015).
Ce colloque s’inscrit dans le troisième volet, celui de la diffusion et de la publication, et souhaite interroger la chaîne du livre à partir de la culture de l’innovation par le design et dans l’esprit de l’innovation sociale et numérique (digital social innovation) . Il s’agit d’appréhender sans les séparer les trois usages fondamentaux de la chaîne du livre (écrire, éditer, lire) dans une perspective systémique et intégrative qui s’inspire du modèle émergent des innovations globales ( full stack innovation). Il est largement admis aujourd’hui que le design est une activité de conception créative Orientée usagers (Norman, 1988) et centrée humain (Krippendorff, 2005). Au carrefour des sciences humaines et sociales, il permet de penser et d’agir les transformations techniques
mais aussi sociales, culturelles et communicationnelles induites par le numérique. Dès lors, appréhender les humanités numériques par le design, c’est les envisager sous l’angle des « usages plutôt que des outils » (Vial, 2015) en vue de s’attacher moins à la mise en données (datafication) qu’à la mise en expérience du monde, par le numérique. Comment la lecture, l’écriture, l’édition, sont elles mises en expérience à l’ère numérique ? Comment peut-on penser et faire le design de ces expériences dans une perspective d’innovation sociale et numérique ? Outre son ancrage en design et innovation sociale, le colloque s’inscrit également dans la
continuité des travaux en sciences de l’information et de la communication sur la textualité numérique, les concepts d’écrits d’écran (Souchier, 1996) et d’énonciation éditoriale (Souchier et Jeanneret, 2005), la lecture numérique (Bonaccorci, 2012) ou encore la littératie numérique et la  translittératie (Le Deuff, 2014). De même, les recherches sur les écrans multiples désormais à la disposition des usagers pourront être convoquées : les interfaces numériques modélisent la relation aux contenus médiatiques qui circulent d’un écran à l’autre, et nécessitent de prendre en compte à la fois les compétences transmédiatiques des usagers et les médiations multiples qui interviennent dans la relation aux interfaces (Catoir et Lancien, 2012).
L’objectif scientifique du colloque est donc double : d’une part, repenser les enjeux, les modèles et les usages d’écriture, d’édition et de lecture en termes d’innovation sociale et intégrative ; d’autre part, contribuer aux humanités numériques par la recherche en design et en sciences de l’information et de la communication. Dans ce but, les propositions de communication pourront s’insérer dans l’un trois des axes ci dessous.
Axe 1 — Écrire
L’écriture est-elle une « technique du corps » (Mauss) ? Quels sont les mécanismes et les enjeux du geste technique d’écrire ? En quoi et jusqu’à quel point l’écriture, en tant qu’activité et pensée créatrice, est-elle indissociable d’un instrument ? Quelle est la part de l’instrument dans la créativité scripturale ou littéraire ? En quoi, audelà du support, l’acte d’écrire luimême est-il affecté par le numérique, que ce soit par "l’éditorialisation de l’auteur » (Vitali Rosati) ou les pratiques d’écriture algorithmique ? Quelles sont les spécificités et potentialités du support numérique pour de nouvelles écritures (Bouchardon, 2014) ? En quoi consiste la « mécanique du texte » (Crouzet, 2015) ?
Axe 2 — Éditer
Qu’est ce que « publier » dans une société numérique ? Comment le numérique transforme t’il l’idée, l’acte et les modalités de « rendre public » un contenu culturel ? Avons nous besoin des mêmes intermédiaires qu’autrefois ? Qu’est ce qu’un éditeur ? Quels modèles full stack pour l’édition de demain, que ce soit dans l’édition générale, l’édition jeunesse ou l’édition scientifique ? Quels modèles économiques pour l’édition à l’ère numérique (Benhamou, 2014) ? Quel rôle pour les plateformes éditoriales en ligne ? La librairie peut-elle continuer à être un entrepôt de livres ouvert au public ? Doit-elle devenir un tiers lieu connecté dont le livre papier ne serait qu’un élément parmi d’autres ?
Axe 3 — Lire
Quel(s) modèle(s) théorique(s) pour l’acte de lire ? Quelle(s) différence(s) entre la lecture numérique et la lecture papier ? Comment s’organise le passage quotidien de l’un à l’autre et quelles en sont les conséquences? Qui sont les lecteurs et quels sont leurs besoins ? Dansquelle mesure les interfaces numériques refaçonnent elles les activités d’écriture et de lecture à l’écran (Le Marec, Jeanneret, Souchier, 2003) ? Va t’on vers une fusion des deux, comme e laisse entendre la notion d’« écrilecture » (Barbosa, 1992) ? Où en notre acculturation à la lecture sur écran ? Quels nouveaux dispositifs de lecture est-il pertinent d’inventer ?
Mots clés : écriture, édition, lecture, cultures numériques, humanités numériques, design, innovation
Modalités et format des soumissions
Les propositions de communication sont destinées à faire l’objet d’une présentation brève et rythmée de 15 minutes, dans le cadre d’une session thématique correspondant à l’un des trois axes. Pour soumettre votre proposition, merci de nous la faire parvenir à l’adresse colloque.ecridil@gmail.com , en 2 fichiers PDF distincts :
1. titre, résumé d’environ 2000 signes hors références, bibliographie
2. courte présentation des auteurs : nom, prénom, profession, affiliation, email
Calendrier
● Date limite d’envoi des propositions : 15 février 2016
● Retours aux auteurs : 15 mars 2016
● Déroulement du colloque : 12 et 13 avril 2016
Comité d’organisation
Stéphane Vial (Université de Nîmes), responsable scientifique du colloque
Marie-Julie Catoir Brisson (Université de Nîmes), responsable scientifique du colloque
Alexandre Simonet (Carré d’Art Bibliothèques)
Caroline Very Mathieu (Carré d’Art Bibliothèques)
Gilles Colleu (Actes Sud)
Marine Royer (Université de Nîmes)
Thomas Watkin (Université de Nîmes)
Comité scientifique
Serge Bouchardon (Université de Technologie de Compiègne)
Marin Dacos (Centre pour l’édition électronique ouverte)
Bernard Darras (Université Paris 1 Panthéon Sorbonne)
Michela Deni (Université de Nîmes)
Milad Doueihi (Sorbonne Universités)
JeanPaul Fourmentraux (Aix Marseille Université)
Thierry Lancien (Université Bordeaux Montaigne)
Nicolas Nova (Haute École d’Art et de Design, Genève)
Michael E. Sinatra (Université de Montréal)
Marcello Vitali-Rosati (Université de Montréal)
Partenaires
Carré d’Art Bibliothèques
Ville de Nîmes
Actes Sud
Références citées
● Benhamou F. (2014), Le livre à l’heure du numérique : papier, écrans, vers un nouveau
vagabondage , Essais, 2014.
● Berra, A. (2012), « Faire des humanités numériques », in Read/Write Book : une introduction aux
humanités numériques , Marseille, OpenEdition Press :
< http://books.openedition.org/oep/238 >
● Bonaccorsi, J. (2012), « Une esthétique renouvelée de la “scène de lecture” : l’iconographie
publicitaire de la lecture sur les tablettes numériques », Mémoires du livre / Studies in Book
Culture , « Nouvelles recherches en histoire de la lecture », Vol.3, n° 2 : <
http://www.erudit.org/revue/memoires/2012/v3/n2/1009350ar.html?vue=resume >
● Bouchardon, S. (2014). La valeur heuristique de la littérature numérique , Paris, Hermann.
● Catoir, MJ., Lancien T. (2012), « Multiplication des écrans et relations aux médias : de l’écran
d’ordinateur à celui du Smartphone », in MEI n°34. Paris, L’Harmattan, p.5365.
● Krippendorff K. (2005), The Semantic Turn: a New Foundation for Design , Boca Raton, Taylor &
Francis.
● Crouzet, T. (2015), La mécanique du texte , Publie.net
● Douehi, M. (2008), La grande conversion numérique , Paris, Seuil.
● Le Deuff, O. (2014), « Translittératie et transmédia : quelles compétences pour de nouvelles
productions “délivrées” » ?, Les Cahiers du numérique, 2014/3, Vol. 10, p. 5572
< http://www.cairn.info/revue les cahiers du numerique 2014 3 page 55.htm >
● Le Marec, J. Souchier, E. Jeanneret Y. (2003) Lire, écrire, récrire: objets, signes et pratiques des
médias informatisés , éditions de la BPI, Paris
< http://books.openedition.org/bibpompidou/394 >
● Millard, J., Carpenter, G. (2014), « Digital technology in social innovation: a synopsis », a
deliverable of the project The theoretical, empirical and policy foundations for building social
innovation in Europe (TEPSIE) , European Commission – 7th Framework Programme, Brussels:
European Commission, DG Research: http://www.tepsie.eu
● Norman D. (1988), The Design of Everyday Things , New York, Basic Books, 2013, 3e éd.
(révisée).
● Souchier, E. (1996), « L'écrit d'écran : pratiques d'écriture et informatique », Communication &
langages, n° 107,, p.105 119.
< http://www.persee.fr/doc/colan_0336 1500_1996_num_107_1_2662 >
● Souchier, E. Jeanneret, Y. (2005), « L’énonciation éditoriale dans les écrits d’écran »,
Communication et langages , n°1, Vol. 45, p. 3 15
< 􀀀 http://www.persee.fr/doc/colan_0336 1500_2005_num_145_1_3351 >
● Vial, S. (2015), « Les humanités numériques par le design : les usages plutôt que les outils »,
carnet de recherche Design & Digital Humanities (2DH) , 17 septembre 2015 :
< http://2dh.hypotheses.org/13 >